Après avoir brossé le décor général du budget de la France lors de la première partie de son intervention au cours de la 12ème session de l’AFE à Paris, le représentant du ministère du Budget, Arnaud Phelep, a évoqué les enjeux auxquels est confrontée l’AEFE. En prise avec les préoccupations budgétaires des conseillers AFE, M. Phelep a porté un regard critique sur le réseau d’établissements de l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE) en nous exhortant à réfléchir à son redéploiement vers plus d’efficience et d’économie.
Il pense que 3 questions devront trouver leur réponse :
1 – Le réseau recouvre-t-il nos objectifs ?
Ce réseau s’articule entre 451 écoles sur 130 pays, réunissant près de 250.000 élèves. Pour l’entretenir, l’Etat va consacrer 421M€ en 2010 , soit +8,7M€ que l’an dernier (le double de ce qu’autoriserait l’inflation prévisionnelle de 1,2%).
Quelle est la meilleure façon de propager notre culture et notre pédagogie dans le monde ? Faut-il ouvrir de nouvelles enseignes, par exemple ? Est-ce suffisant de disposer de 451 instituts ?
Comparés à nous, nos voisins font pâle figure : 23 établissements pour l’Espagne, 84 pour Royaume-Uni ou 132 seulement pour l’Allemagne. A noter que les Etats-Unis ne comptabilisent même pas 200 écoles, soit deux fois moins que la France…
Et pourtant…. le réseau AEFE ne couvre pas la carte de nos expatriés : on ne dénombre que 6 établissements en Asie et un seul en Amérique latine, contre 23 établissements au Maroc ! Ou bien encore, 12% des enfants français expatriés vivent aux USA, mais ils ne représentent que 5% des élèves scolarisés dans le réseau.
Le poids de notre histoire (coloniale) explique certaines disparités, mais peut-on imaginer une nouvelle donne ? Quel est aujourd’hui le pilotage stratégique de l’AEFE ? Comment assumer un développement vers de nouvelles zones émergentes ?
2 – Les moyens humains sont-ils bien répartis ?
L’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE) dénombre 1200 expatriés, 600 enseignants et 600 personnel d’encadrement.
Il faut savoir qu’un enseignant expatrié coûte 4 fois plus cher qu’un résident local (titulaire de la fonction publique, évidemment).
Il serait souhaitable de se fixer une doctrine d’emploi pour favoriser la ressource la moins onéreuse. Par exemple, limiter l’expatriation aux postes d’encadrement (proviseur, adjoint, agent comptable) ou bien aux pays “difficiles” qui justifient une incitation salariale.
Est-ce le cas au Maroc où travaillent 148 expatriés (soit 12% de l’effectif expatrié) ou bien en Espagne où sont détachées 48 personnes ?!
En poussant encore le bouchon, sur le terrain pédagogique, faut-il absolument qu’un élève scolarisé à Vierzon ou à Mogadiscio suive un programme cloné à l’identique ? Quid des classes bilingues ou de l’ouverture au monde ?
3 – La structure du réseau est-elle adaptée ?
Sur 451 établissements dépendants de l’AEFE dans le monde, on dénombre 77 écoles au statut EGD (établissement en gestion directe), 166 conventionnés et 208 homologués.
Le recours aux EGD constitue le “droit commun”, déplore Arnaud Phelep. Or, un établissement en gestion directe (EGD) coûte en moyenne 20% de plus à l’Agence qu’une école conventionnée. Et pour cause, dans ce système tout est géré depuis Paris, de la mutation d’un prof au remplacement d’une chaise…
Je partage l’avis du représentant de Bercy qui soutient que la gestion directe devrait devenir l’exception, notamment lorsqu’un pays d’accueil exige ce genre de structure ou bien s’il existe une impossibilité de constituer localement un comité de gestion. Est-ce le cas dans un seul pays d’Europe occidentale ? Non. Et pourtant, 27 EGD y sont implantés, soit un quart du total !
Le système de gestion directe est rarement utilisé par nos partenaires : zéro cas pour l’Allemagne ou seulement 21 établissements pour l’Espagne.
Dès lors, M. Phelep propose une stricte définition des critères (EGD, conventionnés, homologués) et la sortie de la gestion directe pour tous les établissements dont cela ne se justifie pas.
J’abonde dans le sens de M. Phelep lorsqu’il suggère le recours à d’autres formules pédagogiques (classe bilingue, accord de partenariat…) sur le modèle de ce que font nos partenaires européens pour développer leur réseau.
Photos Fickr de Luc Legay
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