Nous avons fait l’union monétaire avant de faire l’union économique. Tout le dilemme de l’Europe repose dans ce constat qui a pris un tour dramatique depuis la crise de 2008.
Les premières “Matinales Europe” de l’UDI se sont déroulées dans ses locaux parisiens devant un public captivé (21 fev 2013)
Jean Arthuis, vice-président de l’UDI, Union des démocrates et indépendants, en charge du projet Europe, réveille la politique comme le veut le slogan du parti de centre-droit présidé par Jean-Louis Borloo.
Le 21 février dernier, à Paris, chacun a pu entrevoir diverses solutions en assistant aux Matinales “Europe”, premier rendez-vous mensuel du groupe Europe de l’UDI organisé par sa secrétaire générale Sylvie Smaniotto, magistrate de la Cour des comptes.
On retiendra de la table ronde, présidée par Jean Arthuis, que l’Europe n’est pas un problème pour l’UDI, mais une solution face à nos insuffisances nationales, voire nos impasses. Un message qu’il faudra rendre audible lors des prochaines élections européennes de juin 2014, tandis que la croissance s’embourbe et que le scepticisme s’envole (lire : “Jean Arthuis veut s’entourer des Français de l’étranger” du 18 décembre 2012).
Les 17 pays (sur 27) qui ont adopté l’euro ont “contracté de nouvelles obligations sans commune mesure” avec ceux qui conservent leur propre monnaie, prévient Jean Arthuis. Les membres de la zone euro sont interdépendants, à leur grand regret parfois lorsqu’il faut sauver financièrement ceux qui ont plombé leur économie.
François-Xavier Priollaud a lancé ensuite la table ronde consacrée à la zone euro, au budget européen et à la fiscalité. En abordant à tour de rôle un thème spécifique, les interlocuteurs ont tous eu à coeur de démontrer qu’il était temps de dépasser nos logiques purement nationales et de s’engager vers une harmonisation de nos politiques budgétaire, fiscale et bancaire, le tout facilité par l’instauration d’un “gouvernement économique” permanent et légitime au sein de la zone euro.
Un président permanent
Pascale Andréani, ambassadeur et représentante permanente de la France à l’OCDE, est consternée par l’absence de “gestion quotidienne” de la zone euro. La faiblesse institutionnelle est telle que les pays ne prennent pas la peine de s’informer, en amont, des mesures économiques prises par leurs partenaires, explique-t-elle. On découvre dans le journal que l’Allemagne a augmenté de 3 points sa TVA.
Pascale Andréani propose la création d’un poste de président permanent, garant d’une concertation continue et approfondie sur les politiques économiques des 17. Loin d’entraver les souverainetés nationales, il faciliterait au contraire la tâche des divers parlements et gouvernements, conclut l’ambassadrice.
Jean Arthuis a cautionné cette idée jusqu’à proposer une fusion des fonctions de président du Conseil et de président de la Commission pour “incarner l’autorité de l’Europe”, tout en stigmatisant le “temps partiel” exercé actuellement par Jeroen Dijsselbloem à la tête de l’Eurogroupe, puisqu’il demeure le ministre des Finances des Pays-Bas.
Un budget pluriannuel de 5 ans
Pour sa part, Dominique Riquet, député européen, s’est désolé que le budget européen soit voté dans un cadre pluriannuel de 7 ans, tandis que les élections européennes se déroulent tous les 5 ans, ce qui implique qu’une assemblée nouvellement élue est tenue d’exécuter un budget qu’elle n’a pas voté. Par souci démocratique, il propose que le budget corresponde à la durée d’une législature.
Fédéraliste convaincu, Dominique Riquet, rappelle que le budget de l’Union pèse seulement 1% du PIB de l’Europe (130 milliards par an) contre 28% aux USA ! Une austérité voulue et entretenue, justifie-t-il, puisque le crédo du moment est “moins d’argent pour l’Europe”.
Des ressources fiscales propres à l’Europe
Sébastien Allaire (associé dans un cabinet conseil international) estime que l’Europe doit développer ses propres ressources fiscales, à la condition absolue de ne pas alourdir les contributions de ses citoyens. Il s’agirait donc de diminuer des ressources nationales au profit de l’échelon européen, par un transfert de TVA par exemple.
De nouvelles pistes peuvent être suivies comme la mise en place d’une taxe sur les transactions financières. Jean Arthuis a également évoqué une écotaxe pour les camions de plus de 3,5 tonnes et une taxe carbone aux frontières, lorsque des produits destinés aux consommateurs européens ont été produits dans un environnement moins contraignant que celui de nos industriels.
Tout à son idée de créer des recettes pour alimenter le budget européen, Sébastien Allaire a déploré que la “taxe Google” de 60M€ qui vient d’être obtenue par le gouvernement français n’ait pas pu servir de modèle à une taxe numérique européenne (s’appuyant sur le concept de “travail gratuit” développé par le rapport Collin & Colin) uniquement destinée à financer des projets numériques européens (cybercriminalité, connexions haut débit entre l’Europe et les autres continents…).
Une harmonisation des règles bancaires
A la lumière de la crise apparue en 2008, Thomas Guittet, auditeur général d’une banque européenne, plaide ardemment pour l’harmonisation des règles bancaires. “Aujourd’hui, les banques sont européennes et cela n’a aucun sens de les réguler au niveau national”, soupire-t-il. Il est absurde qu’une même banque implantée dans divers pays doive gérer un lot de contraintes régionales. Mais pas aux yeux des “régulateurs nationaux” qui ont chacun leur vision du marché, leur façon de gérer la crise, mais qui s’accordent tous sur un point : ne rien lâcher de leurs prérogatives. A l’arrivée, on ne favorise pas la construction européenne mais on multiplie des règles de supervision qui génèrent des distorsions de concurrence : par exemple, le prix de l’argent prêté varie selon le niveau de capital fixé pour couvrir les risques.
Pour Jean Arthuis aussi, l’Europe a besoin d’une “autorité de contrôle prudentiel et de résolution de problèmes auprès de la BCE, avec transfert des ressources des régulateurs nationaux”. Il ajoute que les secteurs de l’assurance et de la prévoyance, souvent intriqués aux banques, doivent suivre les mêmes règles de prudence.
Un pilotage économique
L’ancien député Patrick Hoguet pense que la zone euro ne peut plus se dispenser d’un gouvernement économique. Pour soutenir sa proposition, il a égrené toutes les tâches, aujourd’hui plus ou moins en déshérence, dont “cette autorité de pilotage” pourrait être chargée, au point de devenir la clé de voute des travaux des parlements nationaux.
Ce gouvernement économique aurait dans ses attributions de faire respecter les contraintes du Pacte budgétaire tout en définissant les orientations de la politique économique afin de renforcer la croissance et la compétitivité. Les mesures d’austérité qui affectent certains pays pourraient être reconsidérées à l’aune de cet esprit de relance et de croissance, en leur redonnant un peu d’oxygène.
Ses attributions s’étendraient évidemment au contrôle de la monnaie commune et des taux de change, le plus tôt serait le mieux, car aujourd’hui “Europe n’est pas pilotée”, ponctue Jean Arthuis.
Jean Arthuis, vice-président de l’UDI et sénateur de la Mayenne
Une union budgétaire en filigrane
Très attachée au projet européen, l’UDI milite fortement pour une synergie des politiques monétaires, économiques et financières, par le jeu de nouvelles institutions assises sur une légitimité démocratique (lire : “Naissance de l’UDI, sous le signe de l’Europe” du 26 octobre 2012). Il faut rapidement créer l’instrument pour que les gouvernements des états membres “pétrissent ensemble la pâte budgétaire”, image Jean Arthuis.
Le sénateur de la Mayenne a néanmoins attiré l’attention des auditeurs sur le Mécanisme européen de Stabilité qu’il analyse comme “une esquisse d’une mutualisation du surendettement”. Autrement dit, ce mécanisme, qui cohabite avec le budget pluriannuel dont il fut question, “préfigure l’union budgétaire” , a-t-il conclu sur une note confiante.
Pour assister aux prochaines matinales de l’UDI ou rejoindre l’UDI au Royaume-Uni, vous pouvez me contacter à udi.ffe@gmail.com.
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