Les petits ruisseaux des entrepreneurs français à l’étranger font les grandes rivières de l’exportation française !

Ce 30 mai, en présence d’Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger, nous avons débattu de la proposition de loi déposée par Évelyne Renaud-Garabedian et Jean-Pierre Bansard visant à “reconnaître et à soutenir les entrepreneurs français à l’étranger”.

Je suis intervenu au nom du groupe UC lors de la discussion générale.

Le Sénat a voté en faveur cette proposition de loi, modifiée par trois de mes amendements adoptés au cours des débats.

VERBATIM de mon intervention en DG

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Chers collègues,

Depuis longtemps, on cherche à définir la nationalité d’une entreprise lorsqu’elle a son implantation à l’étranger.

Car en fonction des critères choisis, celle-ci aura accès à différentes aides d’opérateurs institutionnels dont la vocation est d’encourager l’export et le développement international de sociétés françaises.

Pendant la crise sanitaire, des appels ont été lancés à travers le monde pour alerter sur la situation de certains entrepreneurs français à l’étranger.

La CCIFI présidée à l’époque par Renaud Bentejat, les conseillers du commerce extérieur, présidé par Alain Bentejac ont mené, dès 2020, une enquête visant à recenser les entreprises françaises à l’étranger et identifier leurs besoins face aux restrictions sanitaires qui, partout dans le monde, ont mis en péril leurs activités.

L’objectif était clair : faire bénéficier ces entreprises d’un filet de sécurité, pour éviter que ces acteurs méconnus et pourtant essentiels de la diplomatie économique française ne disparaissent.

L’Assemblée des Français de l’étranger et, plus particulièrement, sa commission du Commerce extérieur alors présidée par Geneviève Beraud-Suberville, avait proposé des pistes de réflexion importantes.

Depuis, notons les initiatives de nos collègues députés, Anne Genetet et maintenant Stéphane VOJETTA, qui ont déposé une proposition de loi dans une démarche analogue au texte que nous examinons aujourd’hui.

Lors d’une table ronde organisée en novembre 2020 par notre collègue Serge Babary, président de la délégation aux entreprises, j’avais proposé sept pistes d’action.
L’une d’elle consistait à cartographier les entreprises françaises qui « ont un impact positif sur notre commerce extérieur » afin d’identifier les opportunités, de les accompagner si nécessaire.

Aujourd’hui, quel est l’objectif poursuivi par la PPL des sénateurs Garabedian et Bansart du groupe Les Républicains ?
La « reconnaissance » et le « soutien » des entrepreneurs français à l’étranger.

Je suis également convaincu du rôle et de l’importance essentiels des entrepreneurs français à l’étranger.

C’est pourquoi j’avais fait adopter en 2021 un amendement à la loi « Développement solidaire et lutte contre les inégalités mondiales » portée par Jean-Yves Le Drian pour reconnaitre nos entrepreneurs à l’étranger et leur apporter un soutien via l’AFD, comme vous l’avez rappelé et souligné, Monsieur le Ministre.
La loi prévoit déjà ainsi que :
« La France reconnaît le rôle actif des entrepreneurs français à l’étranger comme vecteurs de l’efficacité de notre politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales. »

Je proposerai donc de changer le titre de la PPL qui nous est présentée en :
« Identifier et valoriser les entrepreneurs français à l’étranger »

En effet, il me paraît important de donner une portée plus utile au texte comme l’a rappelé notre collègue Fabien Gay, en nous concentrant sur les entrepreneurs français à l’étranger qui ne sont pas étrangers à la France.
Pour ce faire, il convient dans un premier temps de les cartographier, de mesurer leur flux d’activités avec la France et de communiquer les données concernant l’impact de l’activité entrepreneuriale française à l’étranger.
La proposition de loi déposée par les sénateurs Garabedian et Bansart du groupe Les Républicains comptait 187 mots répartis en 3 articles.
Une minute et 15 secondes pour le lire montre en mains !

À 3 mois d’une échéance sénatoriale, je félicite et remercie ses auteurs pour leur concision.

Dans leur texte, nos deux collègues assimilaient les entrepreneurs français de l’étranger aux seuls Français chefs d’entreprises majoritaires à l’étranger, loin de la startup nation… les entrepreneurs de la Tech abandonnent très vite la majorité de leur capital aux fonds d’investissement. Ils sont pourtant de vrais entrepreneurs, ne les oublions pas.

Les trois articles du texte proposé ont été judicieusement remanié par le rapporteur de la commission des Affaires économiques, Serge BABARY et je l’en remercie.

J’ai toutefois apporté 8 amendements à la version de la commission afin d’apporter des précisions qui me paraissent importantes.

Ils sont fondés sur mon expertise d’entrepreneur français au Royaume-Uni et d’échanges avec les entrepreneurs rencontrés à chacun de mes 483 déplacements.

Je proposerai à l’article 1 de préciser la fonction de direction générale pour prendre en compte tous les entrepreneurs.

Quant à l’article 2, la question des modalités du recensement reste entière.
Des inquiétudes me reviennent déjà sur le caractère intrusif, non désiré par des entrepreneurs binationaux en particulier, et sur le sort des données recueillies par ces « comités de recensement ».
La notion de volontariat n’apparait pas. Il nous paraît indispensable de le préciser.

Une cartographie est nécessaire pour identifier les entrepreneurs. Comme en toute chose, il faut pouvoir connaître la cible avant de pouvoir l’atteindre.
Il serait souhaitable que les conseils consulaires, dont la loi prévoit une compétence en matière économique, puissent être associés, au même titre que les Chambres et les CCE.

Enfin, l’article 3 crée un label. Je salue cette initiative, qui souligne le dynamisme entrepreneurial français dans le monde, déjà incarné par la French Tech.
Le nom « Made by French » proposé par les deux sénateurs les Républicains a été éliminé par la commission. Comme l’objectif à atteindre par le label n’est pas défini, le baptiser maintenant pourrait revenir à mettre la charrue avant les bœufs.

Je proposerai également un caractère automatique si les critères objectifs définis sont remplis de nature à éviter tout arbitraire et possibilité de conflits d’intérêts dans les comités.

Nous proposons également d’inclure des entrepreneurs qui ne vendent pas un savoir-faire français particulier, mais qui œuvrent en faveur de l’attractivité de notre territoire.
C’est le cas des conseils financiers, par exemple. Ils favorisent l’investissement en France.
De même, il revient aux acteurs locaux de décider de l’opportunité́ de publier leur label ou pas. La publicité́ du répertoire des entrepreneurs labellisés soulève des risques en raison de l’instabilité géopolitique observée dans certaines régions. Voilà pourquoi, je proposerai la suppression de l’alinéa 4 de l’article 3.

Monsieur le Ministre,
Vous faites preuve de grandes qualités et d’un dévouement total, exemplaire, en soutien à nos entrepreneurs quand vous passez à l’étranger. J’aurais une grande confiance dans votre capacité à animer directement un tel label.
Mais je vous sais soucieux de respecter le droit de la concurrence, notamment communautaire et vous l’avez rappelé.

C’est la raison pour laquelle j’avais déposé un amendement pour limiter votre action à la désignation de l’organisme qui le délivrerait. L’article 40 nous a été opposé.
Si nous souhaitons éviter au label proposé le même sort que celui du « Deutch Qualitate » de nos amis allemands, il conviendrait d’être prudent avec le rattachement du label au ministère de l’Europe et des affaires étrangères si ce texte devait être discuté devant l’Assemblée nationale.

Qu’est ce qui fait que les Philippins de l’étranger sont des héros dans leur pays ?
C’est que tous leurs compatriotes restés au pays savent combien ils renvoient d’argent dans leur pays chaque année et que c’est déterminant pour leur économie.

C’est pourquoi j’ai ajouté un article pour que le gouvernement communique annuellement les données globalisées des entreprises labellisées permettant d’évaluer les flux financiers réalisés avec la France.

Nos compatriotes comprendront alors que les petits ruisseaux des entrepreneurs français à l’étranger font les grandes rivières de l’exportation française !

Notre groupe ce texte en espérant qu’il ne se limite pas, à l’issue des débats, à une initiative dont l’objectif reste à définir.