La relation France-Chine est-elle un jeu de dupes ? Je salue le travail d’Isabelle Feng qui met en lumière un grave déséquilibre. Dans son article, elle dénonce avec justesse et précision 60 ans d’illusion dans la relation France-Chine et appelle à un changement radical de stratégie : fermeté, valeurs démocratiques et réciprocité comme principes directeurs, mais aussi soutien à Taiwan. Sur ce dernier point, la chercheuse rappelle les efforts du groupe d’échanges et d’études Sénat-Taïwan, présidé par Alain Richard, puis par Jean-Baptiste Lemoyne, ainsi que mon action. Je l’en remercie.

(Résumé) France–Chine : un partenariat déséquilibré

Depuis plus de soixante ans, les relations entre Paris et Pékin se révèlent largement à l’avantage de la Chine. Dès 1964, la France a joué un rôle clé dans la reconnaissance internationale de la République populaire de Chine, mais n’a jamais bénéficié en retour d’un véritable traitement « privilégié ». Qu’il s’agisse des violences subies par les diplomates français durant la Révolution culturelle, des boycotts orchestrés en 2008 ou des pressions exercées lors de la rencontre Sarkozy–Dalaï Lama, l’« amitié sino-française » a souvent rimé avec humiliations diplomatiques.

Sur le plan économique, la France a perdu du terrain. Malgré l’ouverture enthousiaste de son marché, son déficit commercial avec Pékin s’est envolé et plusieurs fleurons industriels (Alcatel, Renault, PSA, Carrefour…) ont subi de cuisants revers. La stratégie chinoise d’« apprendre des barbares pour mieux les dépasser » a permis à Pékin d’acquérir des technologies clés et de se hisser au rang de puissance technologique mondiale. Dans ce rapport de force inégal, Paris a trop souvent cédé aux pressions, espérant des retombées économiques qui ne se sont jamais concrétisées.

Le domaine culturel, longtemps présenté comme un terrain d’entente, n’échappe pas non plus aux ingérences chinoises. Censure d’expositions, effacement du mot « Tibet », contrôle des récits historiques : la France a dû à plusieurs reprises composer avec les exigences du Parti communiste chinois.

Face à ces échecs répétés, l’heure est venue de repenser la politique chinoise de la France autour de trois principes : soutien affirmé à Taïwan, défense sans concession des valeurs démocratiques, et stricte réciprocité dans les échanges. De nombreux élus, dont le sénateur Olivier Cadic, ne ménagent pas leurs efforts pour exprimer leur soutien constant à la démocratie taïwanaise, en paroles et en actes.

Il s’agit désormais d’assumer une ligne claire : traiter avec Pékin, oui, mais en imposant des conditions et en refusant les illusions d’une « amitié privilégiée » qui, depuis des décennies, s’apparente à un jeu de dupes.

Lire l’article France-Chine, un jeu de dupes, publié sur le site de Politique Internationale ou en format PDF

Isabelle Feng est juriste et chercheuse au centre Perelman de l’Université Libre de Bruxelles et vice-présidente du cercle de réflexion Asia Centre.