Arnaud Vaissié, président de la Chambre de commerce française de Grande-Bretagne a récemment écrit une tribune publiée dans le quotidien les Echos dont je vous recommande la lecture. Elle est intitulée : «Il faut mettre fin à la destruction de notre écosystème entrepreneurial» (lire Article Arnaud Vaissié).

Arnaud Vaissié est le président cofondateur d'International SOS, président de la Chambre de commerce française de Grande-Bretagne, ainsi que le cofondateur du Cercle d'outre-Manche à Londres. Il dirige le groupe de travail de l'Institut Montaigne sur la création d'entreprise

Co-fondateur du cercle d’outre-Manche (lire : “Joëlle Garriaud-Maylam désignée secrétaire nationale de l’UMP en charge des Comparaisons internationales et des relations franco-britanniques” du 17 mars 2011), son témoignage apporte une contribution utile au débat sur la fiscalité en France lancé par le Président de la République en novembre dernier.  «Conserver dans notre pays les meilleurs entrepreneurs, ceux qui créent richesses et emplois», lui paraît un enjeu crucial pour la France, et d’observer : «Personne ne peut ni ne veut vraiment lever le voile sur la présence de plus en plus importante d’entrepreneurs français à Londres, à Bruxelles, au Luxembourg ou en Suisse, alors que c’est un phénomène qui a pris une importance considérable au plus grand profit de nos voisins.»

Pour mettre un terme à l’expatriation des entrepreneurs, il propose d’abolir l’ISF (Impôt sur la fortune) et de créer un environnement fiscal qui leur soit favorable. Cette tribune d’Arnaud Vaissié m’a renvoyé à celle que j’avais publiée dans le Nouvel économiste en décembre 1996 (lire : Nouvel Economiste 24.12.96).

A l’époque, alors qu’il était limité à 85% des revenus, le gouvernement d’Alain Juppé décidait de déplafonner l’ISF. J’avais écrit : Un impôt supérieur à son revenu ? Injuste. Que penserait un cadre ou un ouvrier d’un système qui lui prendrait plus d’argent qu’il n’en gagne ? Je constatais : «En envoyant Lavoisier à la guillotine, il fut un temps où la République n’avait pas besoin de savants. Aujourd’hui, il faut croire qu’elle n’a plus besoin de riches. D’ailleurs a-t-elle encore besoin de ses chefs d’entreprises ?»

J’avais alors fondé l’association la France Libre…  d’Entreprendre à Ashford dans le Kent. Un tiers de nos adhérents étaient de futurs chefs d’entreprise, qui rêvaient de liberté, de patrimoine et de signes extérieurs de richesse. Nombre d’entre eux ont connu depuis une réussite exemplaire.

Le Premier ministre François Fillon l’a d’ailleurs souligné lors de sa venue à Londres en janvier dernier : «Inutile d’occulter que certains de nos compatriotes se sont installés en Grande-Bretagne parce qu’ils avaient le sentiment qu’ils n’auraient pas dans notre pays les mêmes moyens pour réaliser leurs aspirations. Ils ont quitté une France qui se reposait beaucoup sur le souvenir d’une grandeur acquise ; qui retardait le moment de regarder en face la réalité du monde. Une France qui négligeait de mesurer ses forces et ses faiblesses et souvent d’engager les réformes nécessaires.»

Le Premier ministre a jugé avec raison que ces initiatives et ces ambitions projettent une image d’ouverture, de dynamisme et de diversité qui contribuent autant à la richesse de la Grande Bretagne qu’à celle de notre pays. Il nous a compris. Cependant, comme Arnaud Vaissié, j’observe que cette génération d’entrepreneurs  est «sédentarisée dans son pays d’accueil et porte souvent un regard critique sur notre pays».

Je pense que les 35 heures et l’ISF sont les deux mamelles d’une France désuète qui résiste au réformisme. Les 35 heures ne sont pratiquées qu’en France. Les deux pays à l’origine de l’ISF (Allemagne 1892 et Pays-Bas 1893) l’ont supprimé en 1997 et 2001. Lors de l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République en 2007, l’ISF n’avait plus cours que dans trois pays : France, Espagne et Suède. La Suède l’a aboli en 2007, et l’Espagne en 2008. Reste la France.

En contrepartie de l’abandon de l’ISF, Nicolas Sarkozy envisage de revenir sur le bouclier fiscal à 50%. Quelle sera donc alors la limite acceptable ? 60, 70, 80, 90, 100% des revenus ? Plus ? Comme je l’ai écrit il y a 15 ans, en élevant la barre à l’infini, on légitime une fiscalité exorbitante pour tout un chacun.

Face à un enchevêtrement de taxes où seuls les plus avertis savent s’y retrouver, j’aspire à une remise à plat consensuelle des impôts et des cotisations sociales pour qu’ils paraissent justes aux citoyens et favorables aux entrepreneurs et à l’emploi.