Dans le cadre des débats du projet de loi de finances, j’ai défendu, ce 10 décembre, un amendement concernant l’avenir du dispositif Pass enfant langue française.
Je remercie le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, pour sa réponse détaillée (ci-dessous) et pour la transmission prochaine de l’évaluation, qui permettra d’engager enfin une discussion claire sur les suites à donner au PELF.
VERBATIM – QUESTION – Olivier Cadic
Le Pass enfant langue française, annoncé en 2022 par le président de la République, devait apporter une solution pour 80% des enfants français qui vivent à l’étranger et qui ne sont pas scolarisés dans le réseau AEFE.
Beaucoup d’entre eux ne maîtrisent pas notre langue.
Un premier million d’euros avait été inscrit au PELF 2024, mais l’an dernier, le gouvernement a suspendu ce dispositif dans l’attente d’une évaluation annoncée pour le printemps dernier. Nous sommes en décembre, cette évaluation n’a toujours pas été publiée. Sauriez-vous, monsieur le ministre, quand nous l’aurons ?
Cet amendement, en attendant, propose de redéployer 300.000 euros pour permettre à la DFAE de conduire, via nos consulats, une enquête fiable fondée sur un outil d’évaluation linguistique fourni par un Institut français. Elle permettra enfin de mesurer pays par pays le nombre d’enfants qui ne maîtrisent pas le français et de préparer le déploiement effectif du PELF dans un prochain budget.
VERBATIM – RÉPONSE – Jean-Noël Barrot, ministre
Monsieur le Président, monsieur le sénateur, il y a bien eu une expérimentation qui a été conduite, vous l’avez rappelé, entre l’automne 24 et l’été 25, dans quatorze pays pilotes au profit d’agents âgés de six à onze ans. Comme le montre l’évaluation qui a été conduite cet été et qui pourra vous être communiquée, cette expérimentation a donné des résultats positifs, mais contrastés par rapport aux objectifs qui avaient été fixés. Si elle a permis de constater l’existence d’une demande, 203 groupes hebdomadaires mis en place accueillant 1182 enfants, elle a également mis en évidence plusieurs limites en termes de niveau de langue et de disponibilité des familles à prendre en charge la poursuite des cours. Seuls 28% des parents s’y disent disposés. Dans ce contexte et compte tenu du budget nécessaire pour étendre le dispositif à l’ensemble des pays, qui est estimé à minima à trois millions d’euros, le PELF n’a pas été reconduit en 2025, ni à ce stade dans le PLF 2026, il convient d’examiner les suites qui pourraient être données à cette expérimentation à travers une offre locale adaptée, avec une contribution financière modeste de la part des parents, un accompagnement des parents souhaitant poursuivre l’apprentissage du français par leur enfant, selon un autre dispositif, par exemple grâce à une association FLAM ou encore de nouveaux pays ciblés au cas par cas, au titre d’opérations de promotion du français. Et donc, dans l’attente d’une discussion autour de l’évaluation qui a été menée, je vous propose, comme l’a fait la rapporteure, de retirer votre amendement.
Comment moderniser l’action consulaire, réformer l’AEFE et renforcer l’influence française à l’étranger ?
Dans cette intervention au Sénat, j’aborde sans détour les points forts, les urgences et les réformes nécessaires pour que la France reste une puissance d’équilibre.
Je salue l’engagement de Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, pour une diplomatie moderne efficace.
VERBATIM
Monsieur/Madame la Présidente,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,
Je souhaite ouvrir cette intervention en saluant votre engagement, Monsieur le Ministre.
Depuis plus d’un an, vous avez pris des initiatives structurantes, indispensables à la souveraineté diplomatique de la France : la stratégie French Response contre les campagnes de désinformation, un plan sans précédent de lutte contre les réseaux de narco-trafiquants, ainsi que deux Assises consacrées à la diplomatie parlementaire et à la coopération décentralisée.
Ces mesures dessinent les contours d’une diplomatie moderne : offensive, lucide, alignée sur les réalités géopolitiques contemporaines.
Il y a deux ans, nous célébrions ici même le réarmement diplomatique voulu par le Président de la République.
Aujourd’hui, avec 3,45 milliards d’euros en autorisations d’engagement, l’augmentation affichée est strictement symbolique : +0,01 %.
Soyons clairs : c’est trop faible pour un pays qui prétend incarner une puissance d’équilibre.
Pourtant, moins de trois ans après le lancement de l’Agenda de transformation du Quai d’Orsay, 85 % des recommandations ont été mises en œuvre.
Cet effort méthodique, rigoureux, commence à produire des résultats visibles.
Il mérite d’être consolidé, certainement pas fragilisé.
La diplomatie est à la Défense ce que la justice est à l’Intérieur : le complément indispensable.
Comment justifier d’augmenter massivement les budgets militaires tout en comprimant ceux dédiés à l’action extérieure, alors même
que la guerre est revenue au cœur du continent européen, que les ingérences se multiplient, et que les crises climatiques, sécuritaires ou énergétiques affectent déjà nos citoyens ?
Pour cette raison, le groupe Union Centriste refusera toute coupe supplémentaire sur cette mission.
Dans un contexte où la manipulation de l’information se professionnalise et où les ingérences étrangères deviennent systémiques, l’audiovisuel extérieur mérite plus que jamais notre soutien.
Notre diplomatie ne peut être seulement institutionnelle : elle doit aussi être stratégique, numérique, proactive.
Je veux saluer l’effort consenti en matière de communication stratégique.
La DPC atteindra près de 16 millions d’euros, permettant notamment de déployer dans nos postes des outils modernes de veille et de réponse informationnelle.
Dans ce combat, France Médias Monde et TV5 Monde jouent un rôle essentiel : promotion de la langue française, pluralisme culturel, lutte contre la désinformation.
Pourtant, comparé à leurs équivalents internationaux, leur financement demeure insuffisant. Il est temps de traiter cet outil comme un pilier d’influence, non comme un poste variable.
Je veux également saluer la décision d’organiser le sommet Africa France de 2026 au Kenya.
Choisir un pays anglophone est un signal politique fort : celui d’une stratégie africaine réorientée vers le partenariat, l’ouverture et la coopération économique.
Je reviens d’ailleurs de Nairobi, où j’ai pu mesurer les enjeux d’Africa France en participant à ma sixième fois cette année régionale des Conseillers du Commerce extérieur de l’année.
Les CCEF, tout comme les représentants des chambres de commerce françaises à l’étranger, représentent une formidable source d’inspiration pour notre action au parlement et en faveur de la diplomatie économique.
Je leur adresse toute ma gratitude pour ce qu’ils font chaque jour, pour la France, et pour nos partenaires dans leur pays d’accueil.
Concernant le programme 151 – Français de l’étranger et affaires consulaires, avec ma collègue Olivia Richard, nous sommes évidemment préoccupés par sa diminution globale, même si nous nous réjouissons de la hausse de 11,5 % des crédits dédiés au service consulaire.
C’est un investissement utile :
• état civil numérique,
• vote par internet,
• dématérialisation du renouvellement des passeports.
Ces avancées ne sont pas symboliques : elles améliorent concrètement et durablement la vie de nos compatriotes établis hors de France.
Je tiens aussi à saluer le leadership de Pauline Carmona, directrice des Français de l’étranger, toute la direction des Français de l’étranger et les consulats : la lutte contre la fraude produit déjà des résultats concrets.
Dans un seul pays : 265 dossiers réexaminés, 160 faux boursiers identifiés.
Preuve qu’une politique exigeante, appuyée sur l’accès aux données bancaires, fonctionne, comme l’a dit ma collègue Nathalie Goulet.
Non, l’ANEFE, que j’ai l’honneur de présider, n’a pas été supprimée, comme je le lis à nouveau sur votre document budgétaire.
À l’occasion du 50ᵉ anniversaire de l’Association nationale des écoles françaises à l’étranger, notre ministre Eléonore Caroit l’a rappelé : l’ANEFE continue d’assumer une responsabilité financière déterminante, avec 230 millions d’euros garantis par l’État pour 35 établissements.
L’association s’est ouverte aux écoles non homologuées, afin que personne ne soit écarté.
Et je constate que pour la seule Tunisie, 7000 jeunes ont passé le baccalauréat en candidat libre cette année.
Et cela nous conduit au sujet central — l’éléphant dans la pièce.
Ou plutôt : le mammouth.
En 2008 déjà, élu des Français du Royaume-Uni, je déclarais :
« Si l’on transforme le réseau AEFE en cause nationale financée sans limite, nous verrons naître un nouveau mammouth. »
Eh bien, nous y sommes.
Le mammouth existe.
Et il a grossi.
L’AEFE représente 12 % du budget total de l’action extérieure de l’État.
Nous sommes passés de 200 à 400 millions d’euros de subventions.
Les subventions accordées aux 68 EGD équivalent de fait à attribuer des bourses à leurs élèves, sans condition de ressources ni condition de nationalité.
Cela avec une opacité sur les rémunérations des agents incompatibles avec l’exigence publique. Les dix premières rémunérations de l’AEFE atteignent en moyenne 23 000 euros par mois.
Ce modèle n’est plus soutenable — ni financièrement, ni socialement, ni stratégiquement.
Je salue donc la décision du gouvernement et les efforts des équipes du ministère pour engager enfin sa réforme.
Elle devra reposer sur trois principes :
✔ un juste coût : transparent, comparable entre établissements ;
✔ un juste prix : lisible et accessible pour les familles ;
✔ une cohérence tarifaire internationale.
Ce n’est pas une réforme technique :
C’est une réforme de survie.
Nous subventionnons un modèle qui scolarise moins d’un enfant français sur cinq à l’étranger.
Plus grave encore : les classes moyennes sont progressivement exclues.
Nous sommes passés de 131 000 élèves français à 121 000 en 10 ans.
Quant au nombre de boursiers, il a baissé d’un tiers en 3 ans, près de 30 000 à un peu plus de 20 000.
Aujourd’hui, l’AEFE reçoit 391 millions d’euros.
Les deux tiers bénéficient à des élèves étrangers.
Ce n’est pas conforme à la mission d’équilibre de l’AEFE.
Transférer la moitié de cette enveloppe vers les bourses permettrait d’en tripler l’effet et de réintégrer les classes moyennes françaises dans notre système.
Enfin, sur les 80 % d’enfants français non scolarisés dans le réseau, je l’ai souvent rappelé, beaucoup ne maîtrisent pas le français.
Pourtant, pour la deuxième année consécutive, les crédits du Pass Éducation Langue Française (PELF) sont suspendus. C’est un non-sens.
Je déposerai donc un amendement visant à mesurer la maîtrise du français par nos enfants, pays par pays. Sans mesure, il n’y aura ni stratégie, ni résultat.
Je veux saluer également le rôle essentiel des Alliances françaises et des associations FLAM, qui peuvent nous permettre un jour d’atteindre l’objectif que tous les enfants français à l’étranger puissent parler français.
Face aux contraintes budgétaires, nous devons mieux coordonner, mieux cibler, mieux mobiliser nos partenaires européens et internationaux.
Pour finir, je veux citer les propos de Nadia Chaaya, présidente du groupe les Indépendants tenus en octobre à l’AFE. Je la cite « Nous vivons à l’étranger, mais nous ne sommes pas étrangers au sort de notre pays. Cette période de crise doit nous pousser à nous demander ce que nous pouvons apporter à la France, plutôt que ce que la France peut nous apporter ».
Nos compatriotes de l’étranger représentent un réseau unique d’influence, trop longtemps sous-exploité. Ils sont un atout stratégique et font notre fierté.
Je veux leur rendre hommage.
Pour toutes ces raisons, le groupe Union Centriste votera les crédits proposés pour la mission « Action extérieure de l’État ».
Le Premier ministre l’a rappelé dans sa déclaration de politique générale que l’objectif de redressement des finances publiques n’est pas seulement financier, c’est aussi une obligation morale à l’égard des générations futures.
La mission “Action extérieure de l’État” ne représente que la moitié des crédits du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE), l’autre moitié relevant de la mission “Aide publique au développement”.
Le gouvernement a proposé 1,3 milliard d’euros d’économies sur la mission “Aide publique au développement” et 200 millions d’euros d’économies sur la mission “Action extérieure de l’État”.
En séance, Jean-Noël Barrot a rappelé que son ministère supporte déjà 10 % des économies demandées à l’État, alors qu’il ne compte que pour 1 % de son budget : il fait donc dix fois plus que les autres ministères !
De surcroit, le gouvernement a posé un amendement, la veille des débats, portant sur 25 millions d’euros d’économies supplémentaires, dont 5 millions sur la masse salariale liés aux décisions relatives aux jours de carence, 15 millions sur le programme 105 et 2 millions sur le programme 151 et 3 millions sur le programme 185.
« Cet effort, le ministère le prend sur lui, a revendiqué Jean-Noël Barrot, pas question de le reporter sur les Français de l’étranger ou sur la diplomatie d’influence… Les programmes 185 et 151 sont donc considérablement préservés. »
Dans le même temps, la rapporteure de la commission des Finances a défendu un amendement diminuant les crédits de la mission de 50 millions d’euros pour participer à l’effort budgétaire.
J’ai préféré soutenir l’amendement de réduction budgétaire du gouvernement. Comme l’a justement résumé le président de la Commission des Affaires étrangères : ce n’est pas au cœur de s’exprimer ici, mais à la raison.
Ce 1er décembre, en ma qualité de président du groupe d’amitié France-Pays du Golfe, j’ai eu l’honneur d’accueillir au Sénat une délégation du Bureau exécutif de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme des Émirats arabes unis, conduite par son directeur, Hamid Saif Alzaabi.
Étaient en outre présents mes collègues, Joëlle Garriaud-Maylam, présidente déléguée pour les Émirats arabes unis, Dany Wattebled, président délégué pour le Koweït et Nathalie Goulet. +d’images
Le 19 mai 2020, le Sénat a adopté la proposition de loi relative aux Français établis hors de France, présentée par Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues. Les deux rapporteurs étaient Jacky Deromedi pour la commission des Lois et Jérôme Bascher pour la commission des Finances.
Le gouvernement fut représenté par Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Au cours de la séance, les sénateurs ont adopté plusieurs amendements tendant à :
– permettre à un candidat à une élection consulaire de déposer sa candidature auprès d’un poste consulaire de la circonscription qui n’en serait pas forcément le chef-lieu ;
– permettre de recourir au vote par correspondance “papier” pour les prochaines élections consulaires ;
– instaurer ou renforcer la représentation des élus des Français de l’étranger dans les conseils d’administration de Business France et de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) ;
– renforcer la transparence sur la liste des pays situés dans une “zone de circulation de l’infection” dont les arrivants sont soumis à un dispositif de quarantaine.
« Il est possible, je l’espère, que l’épidémie soit réglée avant l’issue de la navette », a souligné Jean-Baptiste Lemoyne. La proposition de loi n’a ainsi pas vocation à être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dans un futur proche.
Intervention 1 – Discussion générale(vidéo 8m)
Je suis intervenu au nom du groupe Union centriste en discussion générale, avant l’examen des articles, pour donner mon sentiment général sur cette PPL. L’occasion de témoigner du travail remarquable de nos conseillers consulaires et de leurs priorités.
Intervention 2– Registre des Français de l’étranger(vidéo 1:30)
Défense de l’amendement posé par ma collègue Nathalie Goulet qui visait à lier le bénéfice du statut de Français établis hors de France à l’inscription obligatoire au registre des FE du consulat.
Intervention 3 – Rôle du délégué consulaire(vidéo 1:10)
Il faut revaloriser la fonction de délégué consulaire et lever l’ambiguïté sur ses attributions. J’ai proposé l’appellation de “délégué des Français de l’étranger”.
Intervention 4 – Quarantaine pour les FE(vidéo 1:50)
Pendant la période de confinement, nous avons été l’un des rares pays à n’avoir fait aucun contrôle sanitaire à l’entrée de notre territoire. J’avais interpelé notre ministre de la Santé à ce sujet. Je pense que la quarantaine devrait viser les gens à risques, grâce aux tests, plutôt que d’adopter une approche par pays de provenance.
Intervention 5 – Aide financière au réseau AEFE(vidéo 1:40)
L’avance de trésorerie de France-Trésor de 100 millions à destination de l’AEFE deviendra-t-elle une subvention, un crédit budgétaire ? Par ailleurs, nous n’avons pas d’éléments financiers sur la situation des écoles de notre réseau d’enseignement français à l’étranger. Quels critères vont déterminer les enveloppes budgétaires ?
Intervention 6 – Certificats de vie(vidéo 2:40)
Les certificats d’existence empoisonnent la vie de nos retraités bien vivants, alors que les fraudeurs profitent de ce procédé papier (qui peut être signé par les autorités locales) pour toucher les pensions des retraités décédés. Le certificat d’existence est à bannir à l’aune des technologies dument éprouvées à notre disposition.
Intervention 7 – Explication de vote(vidéo 1m)
Lors de l’explication de vote et pour finir sur une bonne nouvelle, j’ai annoncé que les 160 étudiants français de Iaşi et de Cluj, dont j’avais parlé dans la discussion générale, venaient de trouver une solution pour rentrer en France. En effet, ceux-ci avaient affrété un vol privé, via deux associations, mais notre ambassade à Bucarest leur avait refusé son autorisation. Cette autorisation vient d’être accordée par l’ambassadeur de Suisse en Roumanie, ce qui leur permettra d’atterrir à l’aéroport international de Bâle-Mulhouse-Fribourg.
A l’issue de ce débat, j’ai apprécié les propos de conclusion du président Retailleau qui a découvert que les Français de l’étranger étaient parfois considérés comme des “citoyens de seconde zone”. Pour la prise en charge des soins, on exige d’eux ce qu’on n’exige d’aucun non-nationaux, a-t-il illustré, parlant aussi de discrimination vis-à-vis des Français hors UE ou Schengen pour les prélèvements CSG-CRDS ou les mesures de quarantaine.