A quoi sert un secrétaire d’Etat chargé du commerce extérieur ? “Tous les jours je vends du patriotisme économique !”, clame Pierre Lellouche, venu rencontrer, le 10 mars dernier, les conseillers élus de l’AFE, réunis en travaux à Paris. “A prix et à qualité comparables, il faut acheter français”, voilà le message que doivent relayer les Français de l’étranger, à commencer par leurs représentants élus. L’enjeu est vital puisque “notre marché intérieur ne suffit plus” et l’instar de toutes les économies européennes et même des Etats-Unis, “les emplois créés ne peuvent l’être qu’à l’export“, insiste Pierre Lellouche en rappelant que 100.000 jeunes déboulent chaque année sur le marché du travail.

Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat chargé du commerce extérieur, s'exprimant devant l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE), le 10 mars 2011.

Aucune fatalité ne pèse sur notre pays, d’autant que la croissance mondiale existe ! Elle se situe entre 5 et 10% dans bon nombre de pays, commente-t-il. Encore faut-il aller la chercher. L’Allemagne, dont les excédents commerciaux nous sidèrent, explore depuis longtemps les marchés émergents.

Mais voilà, “nous sommes un pays de Gaulois” se désole le secrétaire d’Etat, comprenez qu’on a “du mal à jouer collectif”, tandis que les grands groupes japonais, allemands ou coréens se déplacent tout naturellement en compagnie de leurs sous-traitants. De plus, la France souffre de la “dispersion de ses instruments de soutien, au niveau étatique, régional ou privé.” Au résultat, on dénombre 87.700 PME françaises à l’export, contre 400.000 en Allemagne. Un froid silence tombe dans l’amphi du ministère des Affaires étrangères.

Il est vrai que la France demeure le second exportateur européen et le cinquième au niveau mondial, mais “il faut être plus agressif” pour ne pas rétrograder dans le concert des nations, à l’image du secteur agroalimentaire (250.000 emplois) dont la part du marché mondial a fondu de 9 à 6% en l’espace de dix ans à peine.

Plus agressifs, mais aussi “moins naïfs” ! Ce dernier constat s’adresse d’ailleurs à tous les pays européens qui n’osent pas imposer le principe de la réciprocité dans leurs échanges. Ainsi, une grande compagnie chinoise peut construire une autoroute en Pologne sans qu’une entreprise européenne puisse soumissionner aux appels d’offres chinois en matière d’autoroute, illustre M. Lellouche ; ou bien encore, un constructeur japonais de train à grande vitesse peut concourir et gagner un marché public britannique, sans que Siemens ou Alsthom puissent soumissionner pour des contrats équivalents au Japon. Certes les Japonais adorent la France, mais des arguties juridiques bloquent nos trains ou notre viande aux frontières. “Soyons un peu moins naïfs, ce n’est pas du protectionnisme de dire cela. Le libre échange, ce sont des règles”, s’indigne Pierre Lellouche.

Justement, il travaille à l’élaboration d’un texte à Bruxelles favorisant la réciprocité qui pourrait bien sortir avant l’été. Par ailleurs, le secrétaire d’Etat compte bien veiller à l’application des accords en matière de propriété industrielle, autre terrain où la naïveté des européens ne sert pas leur intérêts.

Tout au long de son “CDD”, comme il l’aime à qualifier son mandat, Pierre Lellouche va s’ingénier à décrocher de grands contrats (nucléaire, traitement des eaux, transport…) tout en portant une vive attention aux PME françaises qu’il faut absolument valoriser, à l’image la campagne “So french, so good” qui mobilise déjà l’appareil d’Etat dans 170 pays. Pour leur ouvrir la voie localement, toutes les occasions sont bonnes, “je compte sur vous en première ligne”, nous a-t-il intimé.