Un homme peu commun, un Anglais atypique, tout à la fois historien, sociologue, philosophe et romancier, nommé Théodore Zeldin nous a fait le grand plaisir de sa présence à Ashford, le 20 octobre dernier, lors de la conférence UFE Corporate.

Théodore se trouvait assis à la table ronde consacrée au métro transmanche, il aurait pu tout aussi bien s’installer la tribune pour parler de l’emploi ou de l’entreprise, lui qui fut appelé à la Commission pour la libération de la croissance française (dite « Commission Attali ») en 2007, ou bien encore disserter sur les aspirations et les angoisses des individus à travers l’histoire des civilisations qu’il étudie. Face au public, il avait le regard espiègle de celui qui sait et qui aime amuser la galerie, trouvant immédiatement le bon mot ou l’anecdote juste dans la base de son érudition. Ne jamais être ennuyeux, semble être son crédo.

Mais il a d’abord étonné le public en utilisant à la perfection la langue de Molière, d’un timbre de voix léger et assuré. En effet, Théodore est un Anglais qui aime la France, le pays du “bien vivre”. Il s’est même rendu célèbre chez nous en publiant son “histoire des passions françaises”, en 5 volumes excusez du peu !

Il a découvert une vérité confondante pour un étranger : “En France, tout le monde se considère intelligent.” Côté britannique, ce n’est pas le cas de longue date puisque leurs aristocrates “ont toujours prétendu être idiots” (une posture qui leur a peut-être sauvé la tête…). Ainsi, “du temps des Lumières, les Anglais venaient à Paris lorsqu’ils voulaient discuter de façon intelligente.” Théodore nous donne une idée lumineuse pour entretenir l’esprit d’universalité des Lumières : “La France doit être l’avocat du polylinguisme.” Cela vaut son pesant de la part d’un Anglais…

Un métro transmanche pour rapprocher les hommes, s’enrichir de leur diversité et jouer de leur complémentarité ne pouvait que plaire à Théodore Zeldin. Il pense que faciliter le flux de travailleurs entre le Kent, jardin de l’Angleterre et le Calaisis, terre agricole, pourrait conduire à “réinventer la vie rurale” à l’heure où la moitié de l’humanité résidait désormais en ville, tout en “aspirant à la paix des campagnes.” L’important étant à terme “d’avoir une vie équilibrée”.

Tout inspire ce scientifique méticuleux qui nous parle comme un poète et qui adore les nouveautés d’autant qu’elles parviennent à “se mélanger avec le passé”